Faire face aux difficultés de financement des coûts opérationnels de base
Imaginez une équipe de secours chargée de sauver un groupe sur un bateau en train de couler. En s’approchant, elle découvre des trous dans leur propre bateau, qui prend rapidement l’eau. Elle doit consacrer du temps et des ressources à réparer les dégâts pour rester à flot, alors que les personnes à sauver attendent toujours tandis que leur bateau s’enfonce de plus en plus. Ce scénario catastrophe implique des décisions à forts enjeux, des compromis difficiles et des besoins urgents – un scénario que nous n’espérons voir qu’au cinéma, si tant est qu’il existe.
“The cost of Insurance and Power is what will shut us down. The amounts have us drowning.”
Dans la plupart des environnements de travail, il existe des éléments essentiels qui permettent aux gens de garder les portes ouvertes et de faire fonctionner les choses. Il s’agit des ressources clés qui jettent les bases de l’exécution d’une mission, à l’instar d’un bateau de sauvetage bien entretenu et exempt de trous. Il ne s’agit pas de fioritures, mais d’éléments de base sans lesquels le travail risque de souffrir. Le secteur caritatif au Canada ne fait pas exception, comme nous l’avons appris lors de l’enquête de la semaine 14 du PCPOB sur les coûts opérationnels de base (un sujet dérivé des suggestions des participant.e.s).
Les coûts de fonctionnement de base peuvent varier d’un organisme de bienfaisance à l’autre, mais ils comprennent souvent des postes budgétaires comme l’assurance ou le loyer d’un espace de bureau – des coûts essentiels au fonctionnement d’un organisme. Notre enquête d’avril 2024 a révélé que les cinq sources de financement les plus courantes sur lesquelles les organismes de bienfaisance comptent pour couvrir leurs coûts de fonctionnement de base (d’après 927 réponses) comprennent les donateurs individuels (60 %), les gouvernements provinciaux (54 %), les événements de collecte de fonds (42 %), les revenus gagnés (39 %), et les fondations et fiducies ainsi que les administrations municipales (32 % dans les deux cas).
La prédominance des donatrices et donateurs individuel.le.s et des événements de collecte de fonds dans cette liste ressort à la lumière des données récentes du 2024 Giving Report, qui indique que le nombre de Canadiens faisant des dons aux organismes de bienfaisance a diminué pendant 11 années consécutives (The Giving Report 2024, p. 6). Ces résultats sont à mettre en parallèle avec ceux de l’enquête du CICP, qui nous apprend que sur les 926 organismes de bienfaisance qui ont répondu, 55 % doivent généralement trouver de nouveaux fonds « constamment » pour couvrir leurs coûts de fonctionnement de base. Cela suggère qu’une majorité d’organismes de bienfaisance sont perpétuellement en mode de collecte de fonds pour couvrir leurs besoins opérationnels de base – essayant constamment de maintenir le bateau à flot tout en poursuivant leur mission.
Il existe un groupe important, bien que beaucoup plus petit, d’organismes caritatifs (19 %) qui ont obtenu davantage de financement de base à moyen ou à long terme, car ils déclarent généralement trouver de nouveaux fonds sur une base annuelle. Il existe également une petite minorité d’organismes de bienfaisance (2 %) qui obtiennent des fonds opérationnels de base tous les deux ans, mais la plupart des répondants se situent dans les catégories de fréquence « constante “ ou ” annuelle », et 68 % des organismes de bienfaisance doivent obtenir des fonds pour couvrir leurs coûts de base deux fois par an ou plus. Pensez à ce que cela pourrait signifier pour ces 68 % d’organismes de bienfaisance d’obtenir un financement opérationnel de base pour une année ou plus à la fois en termes de planification stratégique, de recrutement et de maintien en poste du personnel, et de prestation de services/développement de programmes.
L’enquête du PCPOB nous a également appris que certains des défis les plus courants auxquels les organismes de bienfaisance sont confrontés pour obtenir du financement pour les coûts opérationnels de base comprennent la concurrence pour des ressources de financement limitées (67 %), la capacité limitée pour les efforts de collecte de fonds (51 %), le manque de personnel voué à la collecte de fonds ou d’expertise (51 %), la complexité des processus de demande de subventions (42 %) et l’incertitude des sources de financement futures (40 %). Il n’est pas exagéré d’imaginer que ces principaux défis s’additionnent les uns aux autres dans une certaine mesure. Un autre défi qui est revenu à plusieurs reprises dans les commentaires « Autres » des participant.e.s est que les financeurs ne couvrent souvent pas les coûts de fonctionnement de base :
“Many grantmakers and donors frown on supporting ‘overhead/operating expenses.”
“There is little to no sustainable core funding for non-profits.”
“Many funders don’t want to cover core costs.”
“Funders often want to fund new and exciting projects and are less interested in funding operating costs.”
Bien que le financement d’une assurance ou d’un ordinateur de travail pour le personnel puisse sembler moins tape-à-l’œil ou moins excitant qu’un nouveau projet, ces commentaires des organismes de bienfaisance peuvent peut-être encourager le public et les bailleurs de fonds à réfléchir davantage à ce à quoi nous accordons de la valeur dans les dons de bienfaisance (et à l’équilibre entre le financement de base et les coûts liés aux projets auxquels nous avons contribué par nos habitudes de don/financement). Le financement de la stabilité organisationnelle n’a peut-être pas beaucoup de cachet sur le plan du marketing, mais comme Imagine Canada l’a déjà souligné, lorsque les organismes de bienfaisance doivent compter sur le financement par projet et passent d’un projet à l’autre, le financement de base est souvent insuffisamment couvert de façon hétéroclite. Cette situation a des conséquences négatives sur l’élaboration des programmes, l’évolution de la mission, la durabilité globale du travail et les conditions d’emploi du personnel des organismes de bienfaisance. Cela a également un impact sur la mesure dans laquelle les organisations caritatives peuvent répondre aux besoins qui émergent des situations de crise, telles que les pandémies ou les difficultés économiques.
Les préoccupations relatives au financement de base sont une question récurrente dans le secteur et, bien que le travail par projet soit important, qu’il ait un impact et qu’il mérite d’être soutenu, nous ne pouvons pas éviter de faire face aux implications réelles du non-financement des coûts opérationnels de base et aux avantages d’offrir aux organisations caritatives un financement flexible. Vous n’êtes pas convaincu.e ? Consultez ces histoires d’impact d’Imagine Canada et ces résultats d’une évaluation des résultats des subventions flexibles par l’Ontario Nonprofit Network (ONN). Ou encore ces commentaires d’organismes de bienfaisance dans le cadre de l’enquête du PCPOB :
“It is difficult changing perceptions that NGOs should not have any or have minimal core operating costs. Without the core costs, it would be impossible to maintain or continue to function as a non-profit, resulting in a decrease in services to the people that need it most.”
“More and more corporate funders and foundations are looking at funding programs and services and shying away from providing funding for core operating costs. It’s a challenge to cover salaries…”
“We spend too much time trying to justify why we need funds to cover the basic infrastructure costs. This is also unfairly viewed as ‘overhead’ without the understanding that non-profits have to run just like a business – with proper accounting, HR, IT, leadership and revenue development.”
Les Canadiennes et les Canadiens ainsi que nos représentant.e.s demandent beaucoup aux organisations caritatives, en particulier ces dernières années, mais il n’est ni juste ni raisonnable d’attendre d’elles qu’elles se sortent elles-mêmes par Houdini du scénario du bateau de sauvetage en train de couler, et ce encore et encore. Les organisations caritatives de ce pays sont résistantes et innovantes, mais elles ne sont pas magiques.
— L’équipe du PCPOB
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