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Les associations caritatives et l’IA : un optimisme prudent

July 15, 2025

Time to read: 5 minutes

L’intelligence artificielle (IA) transforme les industries du monde entier, et le secteur caritatif ne fait pas exception. Au cours des deux dernières années, le Projet Canada Perspectives des Organismes de Bienfaisance (PCPOB) a suivi la façon dont les organismes caritatifs canadiens perçoivent et adoptent l’IA (enquêtes 1.10.42 et 2.10.39). Parallèlement, une étude mondiale réalisée en 2024 par la Charities Aid Foundation (CAF) a interrogé plus de 6 000 personnes dans dix pays, offrant ainsi une perspective internationale sur le sentiment du public.

Ensemble, ces études suggèrent un optimisme prudent : les organisations caritatives et le public voient de réelles opportunités dans l’IA, mais les préoccupations relatives à l’éthique, à l’équité et à la connexion humaine continuent d’influencer l’adoption.

Le rôle croissant de l’IA dans le secteur caritatif

En 2023 et en 2024, les organismes de bienfaisance canadiens considèrent de plus en plus l’IA comme un outil permettant d’améliorer l’efficacité des programmes, la prestation des services et l’analyse des données. Notamment, l’utilisation de l’IA pour la création de contenu a connu le changement le plus spectaculaire, passant de 68 % en 2023 à 75 % en 2024. Parallèlement, le scepticisme grandit quant à l’impact de l’IA sur la prise de décision humaine.

“I love AI. It has been so useful in writing policy—rewording documents for clarity and professionalism, suggesting resources for problems we didn’t even know were there.”
– Répondant à l’enquête, octobre 2023

Ce point de vue fait écho aux conclusions de l’étude de la CAF, selon laquelle 37 % des personnes interrogées dans le monde estiment que les avantages de l’IA l’emportent sur les risques, en particulier dans des domaines tels que la réponse aux catastrophes, l’efficacité opérationnelle et la sensibilisation. Il est intéressant de noter que l’optimisme à l’égard de l’IA est nettement plus fort dans les pays à revenu faible ou intermédiaire que dans les pays riches, où une surveillance accrue reste la norme.

Défis et préoccupations éthiques : La conversation inachevée de l’IA

Bien que l’adoption de l’IA soit de plus en plus considérée comme bénéfique, les préoccupations concernant ses défis pratiques en matière de coût, de complexité et de main-d’œuvre persistent. L’un des changements de perception les plus notables est la diminution des préoccupations concernant la complexité de l’IA, puisque moins d’organismes de bienfaisance en 2024 conviennent que l’IA est trop difficile à utiliser (70 % en 2023 contre 64 % en 2024). Cela suggère que les organismes de bienfaisance se familiarisent de plus en plus avec les outils d’IA. En revanche, les inquiétudes concernant le déplacement d’emplois causé par l’IA sont demeurées stables.

Les préoccupations éthiques et interpersonnelles entourant l’IA restent un problème critique, et dans certains domaines, elles ont augmenté. Le changement le plus notable est l’augmentation des préoccupations concernant la confidentialité et la sécurité des données, l’accord combiné passant de 61 % en 2023 à 66 % en 2024. En revanche, les craintes que l’IA puisse réduire les liens personnels entre les organismes caritatifs et les communautés ont légèrement diminué, passant de 69 % à 65 %. Cela suggère que les organismes de bienfaisance pourraient gagner en confiance dans la gestion de l’IA, sans sacrifier l’engagement communautaire.

“While AI can be useful for grant applications, social media, and email campaigns, I fear the risks to personal data. Working with marginalized populations, I do not feel comfortable using AI for anything related to client care.”

(Enquête 2.10.39, octobre 2024)

Au-delà des préoccupations pratiques et éthiques, certains organismes de bienfaisance (Enquête 2.10.39, octobre 2024) s’inquiètent de la fracture numérique, de la violation des droits d’auteur et du risque que les communautés vulnérables soient laissées pour compte dans un monde axé sur l’IA :

“We are, frankly, far more concerned about the negative effects of AI on the sector we represent (music, sound artists) than we are about the impacts on the nonprofit sector as a whole.”

D’autres soulignent les risques plus larges liés à l’empreinte environnementale et éthique de l’IA :

“With its heavy ecological footprint, AI can be environmentally costly, and its daily use may not align with organizations’ sustainability efforts.”

La perception du public dans l’étude CAF reflète des inquiétudes similaires, notamment en ce qui concerne les pertes d’emploi et les risques liés à la sécurité des données. L’une des conclusions les plus frappantes est que 83 % des personnes – en particulier les donateurs – veulent de la transparence sur la façon dont les organisations caritatives utilisent l’IA. Notamment, si les personnes qui donnent le plus sont 30 % plus susceptibles de soutenir l’utilisation de l’IA dans les organisations caritatives, elles sont aussi particulièrement attentives à l’utilisation éthique de l’IA.

Trois suggestions d’actions pour le secteur caritatif

S’inspirant des conclusions du PCPOB et du CAF, les trois recommandations suivantes peuvent aider à guider l’adoption responsable et inclusive de l’IA dans le paysage caritatif :

1. Donner la priorité à la transparence et à l’engagement des donateurs

Les donateurs et le public veulent comprendre comment l’IA est utilisée, que ce soit pour la collecte de fonds, la prestation de services ou la prise de décisions internes. Une communication proactive permet d’instaurer la confiance et de renforcer les relations avec les donateurs et les bénéficiaires.

2. Veiller à ce que l’IA améliore – et non remplace – la connexion humaine

Les inquiétudes concernant la diminution des relations personnelles par l’IA sont réelles. Les organismes de bienfaisance devraient concevoir l’IA comme un outil qui améliore – et non remplace – l’interaction humaine. Par exemple, l’automatisation des tâches administratives peut libérer le personnel pour qu’il se concentre davantage sur l’engagement direct auprès de la communauté.

3. Améliorer l’accès et le soutien à la mise en œuvre de l’IA

Les organismes de bienfaisance de petite et de moyenne taille font face à des obstacles réels à l’adoption de l’IA, qu’il s’agisse de contraintes financières ou d’une expertise technique limitée. De nombreux répondants à l’enquête ont demandé plus d’éducation, de formation pratique et de partenariats pour combler ce fossé :

“Learning opportunities; educational opportunities on how they could work for our organization; all of which comes with a financial cost we don’t have the money for unfortunately.”
“Nous avons besoin des formations avec des experts capables de vulgariser le sujet. Nos sources d’information sur le sujet sont limitées et notre compréhension l’est aussi.”

Pour remédier à ces disparités, les bailleurs de fonds et les leaders du secteur devraient investir dans des formations accessibles, l’apprentissage par les pairs et des outils peu coûteux, afin de garantir que les avantages de l’IA soient partagés par l’ensemble de l’écosystème caritatif.

Conclusion

L’IA présente de réelles opportunités pour le secteur caritatif, qu’il s’agisse de rationaliser les opérations ou d’accroître l’impact. Mais son intégration doit être réfléchie, équitable et transparente. L’optimisme prudent manifesté par les organismes caritatifs et le public témoigne d’un intérêt croissant pour les possibilités offertes par l’IA, ainsi que d’un appel clair en faveur d’une mise en œuvre éthique qui maintient le lien humain au cœur du travail des organismes caritatifs.

Auteur

Nguyen, Thi Kim Quy

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