Entre le marteau et l’enclume : Les principales préoccupations et priorités des organisations caritatives en 2025
Au cours des dernières semaines, le Canada a été plongé dans la tourmente politique et économique. La démission du premier ministre Trudeau et les menaces de tarifs douaniers du nouveau président américain Donald Trump ont aggravé l’incertitude dans tout le pays. Pour les organismes de bienfaisance déjà aux prises avec des pressions financières, ces perturbations rendent la planification à long terme encore plus difficile. Duke Chang, PDG de CanaDon, a récemment prévenu qu’avec les tarifs douaniers imminents, un conflit de travail non résolu à Postes Canada, des risques de cybersécurité croissants et des élections fédérales à venir qui pourraient remodeler le financement gouvernemental, 2025 s’annonce comme une autre année d’instabilité.
Depuis le lancement de ce projet il y a deux ans, nous avons commencé chaque année en demandant aux organisations caritatives quelles étaient leurs perspectives, leurs principaux défis et leurs priorités pour l’année à venir. À l’aube de 2025, leurs réponses reflètent une incertitude accrue. Par rapport à notre enquête de 2024, les résultats de cette année (Enquête 3.02.1, février 2025) révèlent un secteur aux prises avec une baisse d’optimisme, une insécurité financière croissante et des préoccupations grandissantes quant à l’incertitude économique.
« C’est de la folie : Un optimisme en perte de vitesse et un sentiment écrasant d’incertitude économique et politique
Le secteur caritatif semble connaître une baisse d’optimisme, même si le niveau de confiance reste élevé. Au début de 2024, 76 % des organismes caritatifs se disaient optimistes quant à l’avenir ; en 2025, ce chiffre était tombé à 71 %, tandis que le pessimisme avait doublé, passant de 5 % à 10 %.
En effet, le changement le plus frappant cette année est la forte augmentation de l’incertitude économique mondiale, qui a émergé comme le deuxième plus grand défi pour les organismes caritatifs. En l’espace d’un an, les inquiétudes concernant la situation économique mondiale sont passées de 21 % à 55 %.

Certains dirigeants gardent espoir grâce à la confiance de la communauté ou à des accords de financement stables : « Mes perspectives sont optimistes par rapport aux autres organisations culturelles de ma région. Nous sommes dans une position enviable, car nos coûts de base sont couverts par un accord de contribution avec une société d’État qui soutient notre programme phare. Le financement est incertain pour d’autres domaines de la programmation, mais nous savons que nous pouvons maintenir les lumières allumées. » Cependant, pour beaucoup, les perspectives sont de plus en plus sombres. La majorité des organisations se disent préoccupées par le climat économique, l’instabilité politique et la fragilité financière croissante du secteur :
- “The prospect of an ongoing trade war in an economic climate that is already leading to a cost-of-living crisis in a sector that is under-resourced… is what nightmares are made of.”
- “The rising uncertainties caused by Donald Trump and how our federal and provincial/territorial governments will respond, and the resulting future landscape for nonprofits, is a huge concern as food insecurity and poverty rise in ways we haven’t seen—at least in my lifetime.”
- “Donations are down 50% from 2022, and funding has remained stagnant. Grants supplement programs, but operating funds have not kept pace with inflation, and we have been running deficits for two years in a row. This is a worrisome trend, and now the U.S. threat of tariffs has completely taken the plot away. It’s just madness.”
« Nous sommes pris entre le marteau et l’enclume » : Instabilité du financement, pressions sur la main-d’œuvre et autres préoccupations
Le défi le plus pressant pour les organismes de bienfaisance canadiens en 2025 demeure l’instabilité financière. Cette année, 88 % des organismes citent l’incertitude financière comme une préoccupation majeure – une augmentation par rapport à 82 % en 2024.

Cet environnement précaire affecte également la stabilité du personnel et se traduit par des défis opérationnels immédiats. La lutte pour attirer et retenir des travailleurs qualifiés reste l’un des plus grands défis auxquels sont confrontées les organisations caritatives. Beaucoup d’entre eux ne peuvent pas offrir des salaires compétitifs, ce qui conduit à l’épuisement professionnel et à un taux de rotation élevé, en particulier chez les fournisseurs de services de première ligne. Certains dirigeants notent que l’évolution des attitudes et des attentes de la main-d’œuvre en matière de rémunération rend le recrutement encore plus difficile : « Le plus grand défi est la nécessité d’augmenter les fonds pour nous permettre d’embaucher et de conserver du personnel qualifié. Une grande partie du travail du gouvernement est transférée aux organisations caritatives, mais nous ne pouvons pas offrir les mêmes salaires ou avantages, nous sommes donc pris entre le marteau et l’enclume – on attend de nous que nous fassions plus avec moins, mais nous avons du mal à garder notre personnel ».
D’autres soulignent que l’incertitude du financement a une incidence directe sur la fidélisation du personnel, en particulier à l’approche des élections fédérales et en raison de l’éventualité d’un changement des priorités du gouvernement :
- “We rely strongly on government funding, and with a looming federal election, we are uncertain of the future. Our main sourceof provincial funding […] is also ending within the next few years. We’ve never had a problem with hiring new staff, but are unable to guarantee contract extensions for them in advance due to the funding uncertainties, so retention is difficult.”
Au-delà des défis financiers et de main-d’œuvre, de nombreuses organisations sont profondément préoccupées par le climat politique et social général. Certaines d’entre elles constatent que les politiques ayant un impact sur l’équité, la diversité et l’inclusion (EDI), l’immigration et les communautés racialisées suscitent de plus en plus d’inquiétudes :
- “Extremely uncertain times with attacks on EDI, immigration and all racialized people.”
- The trend to vilify and pull back from EDI is of high concern. It calls into question the credentials of people who are often marginalized and oppressed by racism, sexism, ableism, homophobia, transphobia, faith discrimination, etc.
« Nous avons besoin d’un financement opérationnel pluriannuel garanti » : Les priorités des associations caritatives en 2025
Les organismes de bienfaisance se concentrent sur l’obtention d’un financement durable, le maintien des programmes et le renforcement de l’engagement communautaire. Il n’est pas surprenant que le financement demeure la priorité la plus urgente, 77 % des organismes de bienfaisance l’ayant désigné comme une préoccupation majeure – une augmentation de 11 % par rapport à 2024.

Un changement particulièrement frappant cette année est l’importance accrue accordée au recrutement et à la fidélisation de la main-d’œuvre. L’année dernière, ce thème était classé après les relations avec les donateurs et la collaboration avec les partenaires, mais en 2025, il est passé au quatrième rang des priorités. Comme le fait remarquer un dirigeant, « nos priorités sont les suivantes « Nos priorités sont les suivantes : tenter d’établir notre organisation sur le plan financier afin qu’elle ne vive pas au jour le jour, essayer d’augmenter nos salaires pour ne pas perdre des membres précieux du personnel (les arts sont un secteur où les salaires sont très bas), essayer de répondre aux besoins et à la demande de l’organisation avec un accès limité au financement et aux ressources ».
De nombreuses organisations expriment leur frustration face à la nature à court terme des modèles de financement existants, qui rendent la planification à long terme presque impossible :
- “Funding opportunities are too short term – organizations are constantly chasing dollars and having to constantly change services. . . we need to be given more time to strengthen programs that work rather than continuing to change them.”
- We have a need for multi year secured operational funding from all levels of government.
Pour beaucoup, le défi n’est pas seulement d’obtenir un financement, mais de trouver le bon type de financement. S’il est possible d’obtenir des subventions pour des projets spécifiques, elles couvrent rarement les coûts cachés qui permettent aux organisations de fonctionner – salaires du personnel, infrastructure et dépenses administratives :
- “Our organization has no shortage of project funding. What we lack is access to core funding to support the administrative activities. Our directors are underpaid and overworked which taxes and hobbles the organization as a whole. We need access to solid, sustainable core funding.”
- Significant challenges securing operating funds. Donors are willing to fund projects, but projects require planning, organization,fundraising, infrastructure, administration etc.
Conclusion
Ce qui ressort de l’enquête de cette année sur les perspectives d’avenir des organisations caritatives, c’est l’intensification de l’incertitude et la multiplication des défis auxquels elles sont confrontées. L’instabilité financière, les pressions sur la main-d’œuvre et les dynamiques sociopolitiques changeantes continuent de façonner la réalité du secteur. Pourtant, malgré ces préoccupations croissantes, la majorité des organismes caritatifs gardent espoir – même si l’optimisme a légèrement diminué. Cette contradiction soulève d’importantes questions. Quels sont les facteurs qui soutiennent cette résilience ? Est-ce la confiance en leur mission, la solidité des relations avec les donateurs ou une capacité d’adaptation bien ancrée qui permet aux organismes de bienfaisance d’aller de l’avant ? Les analyses futures exploreront ce qui distingue ceux qui gardent espoir de ceux qui se sentent de plus en plus incertains.
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