Qu’est-ce qui se cache derrière cette inquiétude ? Explorer les racines des préoccupations en matière de durabilité dans le secteur caritatif
Le Projet Canada Perspectives des Organismes de Bienfaisance (PCPOB) mène chaque semaine des enquêtes auprès d’organismes de bienfaisance à travers le Canada, explorant un large éventail de sujets liés à leur fonctionnement et à leur gouvernance. En 2024, nous avons demandé aux organisations dans quelle mesure elles se sentaient confiantes quant à leur viabilité à long terme, et les réponses ont été révélatrices.
Si de nombreux organismes de bienfaisance ont exprimé des inquiétudes quant à leur avenir, les raisons derrière ces inquiétudes peuvent aller au-delà de l’instabilité financière.
Afin de mieux comprendre les causes de cette incertitude, nous avons comparé les réponses des organismes de bienfaisance très préoccupés par leur viabilité à celles des organismes qui ne le sont pas, en nous concentrant sur des domaines clés tels que la stabilité financière, la dotation en personnel et la capacité de service.
Les résultats montrent un lien clair entre la stabilité financière et la confiance en l’avenir. Cependant, même certains organismes financièrement stables continuent de faire état de préoccupations en matière de viabilité, ce qui suggère que d’autres pressions, telles que les défis liés à la main-d’œuvre et l’augmentation de la demande de services, peuvent également contribuer à la tension.
La stabilité financière est un indicateur fiable de la confiance
La tendance la plus évidente qui ressort des données est la suivante : les organismes caritatifs financièrement stables sont beaucoup plus enclins à se montrer confiants quant à leur avenir.
- Plus de 90 % des organismes caritatifs qui ne s’inquiètent pas pour leur viabilité se décrivent comme « stables » ou « très stables » sur le plan financier.
- En revanche, seulement 35 % des organismes caritatifs très préoccupés déclarent être financièrement stables.
D’autres indicateurs financiers renforcent ce lien :
- Les organismes caritatifs dont le financement est prévisible sont nettement moins susceptibles de s’inquiéter de leur viabilité.
- Ceux qui sont très préoccupés sont six fois plus susceptibles de déclarer que leur financement est très imprévisible.
- Les fonds de réserve ont également leur importance :
- 55 % des organismes caritatifs qui ne sont pas préoccupés déclarent que leurs réserves sont suffisantes ou très suffisantes.
- Seuls 22 % des organismes caritatifs très préoccupés déclarent la même chose.
Mais ce n’est pas seulement une question d’argent.
Il est intéressant de noter que certaines organisations caritatives financièrement stables continuent d’exprimer des inquiétudes quant à leur avenir. Quels autres facteurs peuvent donc être à l’origine de ces inquiétudes ?
Difficultés en matière de personnel
- 45 % des organisations caritatives très inquiètes font état d’un taux de rotation élevé de leur personnel.
- Étonnamment, le taux de rotation est également élevé parmi les organismes qui ne sont pas préoccupés (41 %), ce qui suggère que le taux de rotation à lui seul n’explique pas les préoccupations en matière de durabilité, mais qu’il peut contribuer au stress organisationnel de certains organismes de bienfaisance.
Demande croissante de services
- Plus de 70 % des organismes de bienfaisance très préoccupés déclarent que la demande pour leurs services dépasse leur capacité actuelle.
- Les organismes de bienfaisance qui ne sont pas préoccupés font état d’un niveau de demande similaire.
Cela suggère que la manière dont les organisations gèrent cette pression peut être tout aussi importante que la pression elle-même.
Planification du leadership : le risque négligé
L’une des conclusions les plus frappantes concerne la planification de la relève :
- Seulement 3,7 % des organismes de bienfaisance très préoccupés disposent d’un plan de relève bien défini.
- Même parmi ceux qui ne sont pas préoccupés, seuls 12 % en ont un.
La plupart des organismes de bienfaisance gèrent les transitions de direction de manière informelle ou ne planifient pas du tout. Comme l’a dit l’un des répondants :
“It is one of those tasks that our organization knows needs to be done, but there are always higher priority tasks that get done first.”
La durabilité n’est pas une destination fixe
La durabilité n’est pas un accomplissement statique ; c’est un processus dynamique qui nécessite une attention constante. Même les organisations caritatives qui semblent stables aujourd’hui peuvent être confrontées à des fluctuations demain, en particulier lorsqu’elles envisagent une croissance ou une innovation.
Comme l’a fait remarquer l’un des participants :
“In our current format, we are very sustainable, but we are exploring a major expansion that could make our situation more volatile.”
Cela souligne un point essentiel : la durabilité doit être activement maintenue et réévaluée à mesure que les circonstances évoluent.
Notre analyse corrobore ce point de vue. Si la santé financière est un indicateur fiable de la confiance, elle ne garantit pas pour autant la sécurité à long terme. Des facteurs tels que les difficultés de recrutement, l’augmentation de la demande de services et l’absence de planification de la relève peuvent tous être sources d’instabilité.
Pour soutenir véritablement le secteur, les bailleurs de fonds, les décideurs politiques et les partenaires communautaires doivent reconnaître que la durabilité exige plus que l’efficacité opérationnelle. Elle nécessite un financement cohérent et flexible, des investissements dans le développement du leadership et un soutien à la planification à long terme. Renforcer le secteur caritatif aujourd’hui signifie jeter les bases d’un secteur caritatif plus résilient et plus réactif.
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